Mes exploits ordinaires, par Marie-Annick

Chaque matin, je me suis levée de bonne heure pour aller travailler, en me disant que d'autres se couchaient de bonne heure sans être allé travailler.

Je suis montée dans ma voiture qui, parfois, n'a pas voulu démarrer.

Je suis arrivée en retard car j'avais perdu mes clés que j'avais malencontreusement laissé tomber, la veille, dans la poubelle qui, heureusement, n'avait pas encore été vidée.

J'ai couru, je me suis essoufflée puis reposée, ensuite j'ai décidé de ne plus courir, de respirer.

Je me suis promenée sur les bords de Loire et j'ai quelquefois observé l'éléphant, lui-même observé par les touristes qui le considèrent comme une spécialité nantaise, au même titre que le Muscadet et les Ptits Lus.

J'ai erré dans les parcs où j'ai rencontré d'improbables passants :

avec ou sans chien,

avec ou sans poussette,

avec ou sans chapeau,

avec ou sans sourire.

J'ai marché dans la ville sur de longues distances, suivant un axe Ouest-Est ou Ouest-Est.

J'ai volé quelques fleurs, mais je les ai coupées soigneusement avec mon sécateur ; je ne me suis jamais fait prendre alors j'ai continué.

J'ai beaucoup fréquenté les bibliothèques et lu trop de romans.

Je n'ai pas su mémoriser le nom des rues que j'arpentais (sauf certains, remarquables : Desgrée du Loup, Basile Valentin, De la Galissonière, Kervégan, Pas du carrousel, Cour de la poule noire…)

mais je ne me suis jamais perdue.

J'ai franchi les ponts et osé le sud Loire, mais pas trop longtemps...Trop de tuiles sur les toits !

J'ai rencontré, boulevard Guisthau, dans un appartement sous les toits, un très vieux luthier que j'ai photographié avec ses outils.

Je ne suis jamais allée à la messe dans la cathédrale mais j'ai admiré le tombeau des parents d'Anne de Bretagne.

J'ai fait du bateau sur l'Erdre (ou sur l'océan) sans en avoir envie mais sans me plaindre.

J'ai conduit mes enfants dans des piscines trop chlorées pour leur apprendre à nager.

Je n'ai pas agressé mon vieux voisin acariâtre pourtant j'en ai eu envie plusieurs fois.

J'ai été voter dans l'école de mon quartier au milieu des immeubles du Breil Malville, avec de moins en moins d'enthousiasme.

Plusieurs fois, dans mes rêves, j'ai quitté la ville pour partir plus à L'Ouest....

              

Mais je suis toujours là. 

 

Marie-Annick